Dans cette conférence enregistrée à Montréal, le 6 mai 2023, on examine 8 raisons qui expliquent pourquoi c’est si dur d’apprendre le français québécois pour les immigrants.
Est-ce que le québécois est une langue?
Au Québec, la seule langue officielle est le français. Le « québécois », ce n’est pas une langue, c’est une variété de la langue française. Ce qu’on appelle couramment «le québécois», c’est plutôt le registre informel de la variété de français québécois, où il y a des expressions, des tournures de phrases et une prononciation qui peuvent être très différentes des français européens.
Voici les 8 difficultés abordées, avec le minutage correspondant de la conférence.
1. Orthographe obscure [7:18]
L’orthographe française est un vrai casse-tête! On peut écrire les sons de plusieurs façons (par exemple, o, au, eau = [o]) et les mêmes lettres se prononcent différemment selon le contexte (par exemple, le EU de feu n’est pas prononcé comme dans peur).
En plus, le découpage des syllabes à l’écrit ne correspond pas aux sons qu’on entend.
Ils habitent une autre ville = « il za bi tu nô tre vil » ou même « ya bi tu nôt vil »!
2. Analphabétisation [11:44]
C’est déjà un grand défi d’apprendre le français à l’âge adulte, imaginez si la personne apprenante n’a pas été scolarisée dans sa langue maternelle! Ce n’est vraiment pas le cas de tous les immigrants : la majorité des gens qui arrivent ici ont été à l’école, savent déjà lire et écrire dans leur langue, mais il y a des personnes qui arrivent, ce sont surtout des personnes réfugiées, qui n’ont pas eu l’occasion d’aller à l’école, qui ne savent pas écrire leur propre langue. Si la langue en question est très différente du français en plus, que l’ordre des mots n’est pas le même, que la conjugaison est différente… Imaginez la tâche colossale pour ces personnes-là, qui doivent apprendre à écrire dans le système orthographique du français.
3. Variation géographique [13:23]
On parle de variation géographique quand une langue voyage et s’établit à différents endroits sur la planète puis qu’elle évolue de façon différente selon les régions. Plus les contacts entre les variétés sont rares, plus le temps passe, plus les variétés auront le temps d’évoluer de façons différentes et plus elles comporteront de différences.
4. Registres de langue [21:46]
Dans la vie, selon les contextes, on ne s’exprime pas de la même façon. Quand on est dans une entrevue pour un emploi et dans un souper en famille, on s’exprime différemment. C’est bien normal! Dans les situations décontractées, on va adopter une langue plus relâchée, moins soignée, qui s’éloigne de la norme, c’est-à-dire des règles de l’écrit.
Notre façon de parler peut alors être imaginée comme une façon de s’habiller. C’est un code plus social que linguistique. Dans un gala, on s’attend à ce que je porte une robe de soirée. Pas quand j’écoute un film à la maison.
5. Contractions [27:15]
Les contractions sont une grande difficulté pour les apprenants du français, particulièrement au Québec.
La contraction, ça fait partie de la norme en français. Ce serait effectivement une faute d’écrire « je aime » ou « le avion ». C’est ce qu’on s’appelle le phénomène d’élision, et ça fait partie du français standard, de la norme.
En français familier, des deux côtés de l’Atlantique, dans le registre informel, les francophones font encore plus de contractions, et ce n’est pas par paresse, mais en raison du principe d’économie. En effet, la langue est avant tout un outil de communication. Si je peux passer le même message en moins de syllabes, je gagne en efficacité! C’est pour ça que « je ne sais pas » devient souvent « ché pas » à l’oral.
Les Québécois sont particulièrement sujets à faire des contractions. Que ce soit la simplification des consonnes à la fin des mots (table = tab’), la fusion des prépositions et déterminants (dans les = dins) ou encore la contraction d’expressions figées (à un moment donné = à manné), vous entendrez énormément de raccourcis en français québécois informel.
6. Vocabulaire [32:32]
Une même langue qui est utilisée dans des sociétés éloignés présentera à coup sûr certaines différences de vocabulaire, encore plus si le contexte est différent (contexte de nordicité, contexte européen/nord-américain…). Plus les variétés sont éloignées géographiquement et contextuellement, plus il y aura de différences entre elles.
7. Difficulté de pratiquer [39:31]
À Montréal, il peut être difficile d’être servi en français ou même de se faire répondre en français dans les rues. Apprenants, persévérez en français si votre interlocuteur passe à l’anglais. Francophones, n’envoyons pas malgré nous le message qu’il n’est pas nécessaire de parler français au Québec. Soyons patients et bienveillants envers les apprenants et répondons-leur en français!
8. Manque de ressources [41:41]
L’excellente nouvelle est que vous êtes au bon endroit pour trouver de nombreuses ressources de qualité en français québécois. Je vous suggère de commencer par la section Cadeaux!